Chapitre 1. Les idées politiques de l’antiquité gréco-romaine

1 Chapitre1. Les idées politiques de l’antiquité gréco-romaine

« Le rayon de lumière venu de la Grèce antique n'est pas le seul, sans doute, qui éclaire l'époque contemporaine, mais, sans lui, la civilisation et la conscience européennes qui touchent aujourd'hui au paroxysme de leur crise ne seraient pas pleinement intelligibles [[1]]. » Un tel propos rappelle à juste titre que l'évolution des institutions politiques européennes doit être analysée à l'aune d'un héritage historique constitutif certes de diverses influences mais dans lequel sont prégnantes les idées politiques et les institutions de la cité grecque.

En effet, les conflits sociaux et politiques qui ont secoué les grandes cités grecques, Athènes et Sparte plus particulièrement, ont atteint un niveau de violence qui a menacé la cohésion et la continuité des « Polis ». Les « nomothètes », législateurs, sages et désintéressés, appelés à la rescousse se sont arrogés la prérogative de définir un corpus de règles connues de tous, élémentaires et fondatrices des premières législations axées sur la réglementation de la vie commune et des relations sociales et économiques au sein de la « cité ». La « loi » ainsi dégagée est l'apport notoire au processus de constitution de la cité organisée, fondamentalement communautaire. « La volonté des individus de se placer sous une loi commune afin de vivre en communauté » constitue le critère fondamental de définition de la « Polis ». La volonté collective ainsi exprimée est à la base de tout pouvoir. Ceci étant dit, nous allons voir l'école de la pensée politique grecque (section1) avant d'examiner celle des penseurs politiques de la cité romaine (section2).

Section1. L'école de pensée politique grecque

Les œuvres de Platon, d'Aristote, de Platon axées sur la construction d'une cité idéale laquelle dépend de la mise en place d'un bon régime politique. Pour se faire, Platon et Aristote ont conçu chacun sa pensée politique. Mais entre le Maitre et l'élève, il existe une différence sur la conception idéaliste de la cité grecque. Ceci nous conduit à examiner le platonisme (le gouvernement des sages) (paragraphe1) et la pensée politique aristotélicienne (paragraphe2).

Paragraphe1. La Platonisme : la sophocratie ou de l'utopisme politique(le gouvernement des sages).

Personnage particulier né en 427 av JC mort en 348 av JC au moment où la démocratie athénienne va mal car elle est battue par Sparte qui y a imposé un régime aristocratique ; Platon appartient à une famille d'aristocrates et c'est l'élève de Socrate. Platon quitte Athènes, il va à Syracuse et revient à Athènes ou il fonde l'académie. En 348 il meurt à Athènes on lui doit deux œuvres politiques majeures : La République (A) et les Lois(B).  L'œuvre de PLATON (4427-346), fortement inspirée par la réflexion, la vie et la mort de Socrate qu'elle met en scène dans les « dialogues platoniciens », première tentative de réflexion systématique sur le politique. Ce thème est l'objet central des écrits dits de « maturité » : La République, Le Politique et Les Lois. D'autres dialogues portant sur l'être et la connaissance, la nature et la morale présente une réflexion dialectique nourrie d'interrogations sur la justice et la vie politique (Apologie de Socrate, Criton, Gorgias).

A.La République

C'est un livre sous forme de Dialogue  écrit vers 375 av JC, c'est un livre sur l'éducation .Dans la République  il s'intéresse à l'âme et notamment à l'éducation de l'âme.

Pour Platon « l'état est l'instrument privilégié appelé à enseigner la justice »

Platon fait partie de ces philosophes qui s'intéressent peu au réel c'est un idéaliste ; dans son livre il va projeter le modèle de la cité idéale. Il explique que l'état n'est qu'une projection élargie de l'âme juste. Il nous explique que l'âme est formée de trois parties :

-La raison qui délibère

-La force qui combat et obéit

-L'instinct qui produit et commerce.

Platon va construire l'état idéal non pas pour qu'il se réalise mais pour atteindre (au niveau de la pensée) à l'état juste.

Selon lui, la société est divisée  de la façon suivante :

-Les chefs qui délibèrent, qui ont la connaissance et qui doivent être philosophes.

-Les guerriers : c'est la force, le courage

-Les producteurs menés par l'instinct qui font la richesse de la cité

Il estime que l'on doit exiger des deux premières catégories une abnégation totale.

Donc les philosophes et les guerriers doivent être soumis à une éducation à base morale.

Ils n'auront pas de famille, c'est là que Platon s'intéresse aux femmes, il va esquisser une loi de reproduction, soumise à l'eugénisme  et à la loi du nombre parfait (référence à Sparte).

Platon estime que dans la mesure où ils ont été éduqués, l'autorité des philosophes n'est jamais abusive. Les lois seront donc inutiles voir mauvaises. « Pour que l'idée du bien triomphe, il faut balayer toutes les lois » Platon

La liberté individuelle n'existe pas : ou la liberté se confond avec la justice, ou elle s'écarte de la justice et devient discorde.

Cette utopie peut être généreuse sur certains points mais dangereuse sur d'autres, on parle alors  de communisme platonicien.

Il va également établir une pathologie de l'état, il va décrire les Constitution Dégénérées.

Pour Platon tout l'univers politique est corrompu et  il établit une classification des régimes politiques. Sa classification est cyclique.

Platon va partir d'un régime qu'il appelle la timocratie, c'est le régime de la guerre

C'est un régime discipliné, mais ce régime est voué à dégénérer et va devenir une oligarchie : c'est la passion de l'argent, le vice principal de ce régime est la rupture de la société entre les riches et les pauvres, on passe avec la révolution des pauvres à la démocratie qui est considérée comme un régime de désordre horrible.

On va ensuite passer à un dernier régime, la tyrannie utilisée pour rétablir d'ordre qui est le réveil des instincts bestiaux mais qui va rétablir l'ordre. Suite à cela on rétablira la timocratie. Le cercle est bouclé.

Platon imagine ici une loi des dégénérescences des régimes politiques que l'on appellera plus tard l'anacyclique.

Cette classification originale signifie que dans l'esprit de Platon chaque régime politique porte en lui les germes de sa propre décadence .Le seul moyen de l'éviter est de mettre en place la cité idéale .Le problème est que la cité idéale est  utopique et irréalisable.

B.Les lois : (366-347 av JC)

Dans son dernier ouvrage, les Lois, Platon s'écarte de la Cité idéale pour définir les conditions possibles d'application de ses théories dans la réalité. Le projet est donc moins ambitieux mais l'auteur imagine toute une série de règlements contraignants destinés à empêcher toute corruption. L'accumulation de ces règlements donne l'image d'un régime plutôt totalitaire. Faut-il voir dans cette absence de liberté les conséquences des déceptions causées par les actions injustes de la démocratie athénienne, qui, par son essence, aurait dû garantir la liberté ?

La Cité idéale de Platon est la première utopie politique dans l'histoire des sociétés occidentales. Pour la première fois, un philosophe propose un mode d'organisation jugé idéal Conclusion : aucun esprit humain ne peut diriger les affaires humaines sans devenir profondément atteint de démesure et d'injustice : la cité modèle  devrait être minuscule de 50-40 citoyens choisis selon des préoccupations ethniques (des citoyens qui doivent être originaires du même pays).  Il faudrait s'éloigner des rivages pour que les citoyens vivent en autarcie. L'idéal pour Platon est donc d'être à l'abri des influences extérieures ; Platon a expliqué que  «  la marine et le commerce, sont  l'âme de la démocratie!(pour lui la Démocratie perverti l'homme) »

Paragraphe2. La pensée politique aristotélicienne : la gouvernance politique 

Son époque est marquée par le renouveau de l'empire macédonien et le déclin de l'influence de la démocratie athénienne. C'est à Aristote que le conquérant Philippe II de Macédoine confia l'éducation de son fils Alexandre le Grand, avalisant peut-être ainsi l'idée de Platon selon laquelle « puisque les philosophes ne peuvent devenir rois, il convient que les rois deviennent philosophes » (Lettre VII). Fils de Nicomaque, médecin d'Amyntas III de Macédoine, et d'une sage-femme, Aristote était assoiffé de connaissance. Pour ces raisons, il suivit à Athènes les cours d'Isocrate, mais peu satisfait il décida de rentrer à l'Académie de Platon à l'âge de 18 ans (vers 367 av. J.-C.). Il y fut remarqué notamment pour son intelligence. Platon lui donna même le droit d'enseigner. Il rédigea de nombreux récits et s'intéressa à la vie politique locale mais ne put y participer du fait de son statut de métèque (« étranger » à la cité). Ceci dit, on va voir les fondements de la pensée politique d'Aristote.

A.Aristote et les fonctions de la politique

La Politique est l'un des plus anciens traités de philosophie politique de la Grèce antique.

Le mot politique tire son étymologie du mot grec polis, qui correspond à la cité (dans l'étymologie latine civitas).

Aristote, La politique. Dans cet ouvrage, il associe politique et délibération. La politique est le fait de délibérer et de prendre des décisions. Mais ces décisions sont particulières, elles concernent l'intérêt commun. Il définit la politique au travers de la fonction du pouvoir délibérant qui «décide de la paix et de la guerre, décide de contracter des alliances ou de les rompre, de faire des lois ou de les abroger, de décerner la peine de mort, de bannissement et de confiscation ainsi que de faire rendre compte aux magistrats ».Ici, on retrouve l'aspect diplomatique de la politique. C'est donc les relations avec les autres cités. Aujourd'hui on parlerait de négociations et de traités. Enfin, la question centrale de la politique est la décision de faire la guerre ou éventuellement de passer un traité de paix.

La deuxième fonction essentielle du pouvoir délibérant est l'édiction des lois. Ce sont les lois qui vont s'appliquer à l'ensemble des citoyens. Ces lois varient d'une cité à l'autre. Mais dans la vision grecque la cité repose sur l'isonomie c'est-à-dire que la loi s'applique uniformément à tous les citoyens et donc il est clair que là encore les lois correspondent à des décisions générales. A travers de ces deux éléments, on trouve des schémas qui nous sont familier. Nous fonctionnons toujours sur la base de ces éléments.

Enfin, le pouvoir délibérant est chargé de faire rendre compte aux magistrats (=autorité exécutive). Dans cette théorie, le pouvoir délibérant varie d'une cité à l'autre. Dans certains cas, c'est l'assemblée de tous les citoyens et dans ce cas on se trouve alors en démocratie. Dans d'autres cas, il s'agira d'une minorité de citoyens et donc on appellera ça une aristocratie. Enfin, dans un troisième cas, il peut être exercé par un seul homme, dans quel cas on sera dans une monarchie. La politique est ce qui intéresse le bien commun et il y a un organe qui est chargé de la décision politique ; cet organe est variable. La politique est la décision. En ce qui concerne les affaires extérieures et la politique intérieure.

B.Aristote et les formes de gouvernements

Dans La Politique, Aristote tend à analyser l'origine, la finalité et le fonctionnement de l'État, mais aussi à étudier le fonctionnement des régimes politiques de son époque. Son but est de dégager le meilleur régime politique possible, l'État idéal. En même temps, il veut que cela soit réalisable.

Pour ce faire, il soutient qu'il y a une différence nette entre les Grecs et les Barbares. Les Grecs se distinguent eux-mêmes du reste de l'Humanité, grâce à une certain mode d'organisation politique, sous la forme de la cité. Aux yeux des Grecs, les Barbares ne parlent pas vraiment, car ils ne parlent pas le grec, qui sera la langue de la raison selon eux. Le logos est la langue, le discours et la raison. Ils distinguent trois formes essentielles d'organisations politiques:

 Politeia: l'organisation sous la forme de la cité. Chez les Grecs, il y avait une myriade de cités, la civilisation grecque était donc une civilisation où l'organisation repose sur la cité, sur des cités de petites tailles. Selon ARISTOTE, l'organisation sous la forme dela cité est la meilleure organisation possible, parce qu'elle garantie l'auto-suffisance, l'autarcie. La cité précède l'Homme puisque l'Homme ne peut pas vivre en dehors de la cité.

 Basileia: si on regarde les états qui entourent la Grèce, les Barbares s'organisent souvent sous forme monarchie. Cette organisation se distingue assez nettement de l'organisation de la cité. Ce n'est pas forcément une mauvaise forme politique pour les Grecs, et certaines cités peuvent adopter cette forme politique.

 Despoteia: c'est l'idée de despotisme. C'est une forme d'organisation sociale que les Grecs désaprouvent. Le despote est quelqu'un qui règne sur les esclaves. La cité au contraire est composée de citoyens, des hommes libres. Ces citoyens règnent sur une maison, et ont des esclaves. C'est un système typique des peuples orientaux, des peuples barbares.

La notion de politeia désigne la constitution de la cité mais également le statut des citoyens libres.  On trouve déjà ici la distinction entre la République et la Monarchie. La politeia renvoie à la République dans le sens où on a un Gouvernement collectif. Ce Gouvernement pourra ensuite être démocratique ou aristocratique, par opposition au Gouvernement d'un seul homme qui caractérise la Monarchie ou éventuellement le despotisme. Ce qui caractérise la politeia est une certaine rationalité, et le respect d'un certain ordre. Dans la démocratie Grecque, les citoyens s'assemblent et discutent. Le nomos est la loi, et en ce qui concerne cette loi, il s'agit de la justice, c'est-à-dire une sorte de loi naturelle. La cité se soumet aux lois qu'elle édicte.

Eunomia représente une certaine harmonie des pouvoirs. Dans la tradition grecque, il y a l'idée de la supériorité de la cité sur les autres formes de Gouvernement. Mais historiquement, et selon les époques, on a fait primer la notion de politeia ou de basileia.

Section2. L'école de pensée politique romaine

Les Romains, sur le plan des idées politiques, n'ont pas apporté d'innovation majeure. Cependant, la pensée politique des Romains est influencée par celle des Grecs. Pour cette école de pensée, nous allons mettre l'accent sur la pensée politique de Cicéron (paragraphe1) et sur celle  de Polybe (paragrphe2). 

Paragraphe1. Cicéron

Cicéron (106-43) est un brillant orateur, un avocat influent, un homme politique parvenu aux plus hautes fonctions, le consulat. Humaniste, il accorde une place essentielle à la morale, au droit et à l'universalité et prend une part active dans les débats sur la République.

Sa réflexion est directement inspirée par la succession des crises politiques que connaît Rome au 1er s. avant J.-C. Cicéron entend lutter contre les conspirations, les complots et les crimes en restaurant l'autorité de l'Etat et en imposant le respect du droit dans la conduite des affaires de la cité. Ses deux œuvres politiques majeures, De Republica (De la République) et De Legibus (Des lois) pose les conditions d'une nouvelle organisation des pouvoirs. A cet égard, Cicéron insiste sur l'importance de la « loi naturelle » en politique, la nécessité de la raison et de la connaissance comme outils de gouvernement et les exigences d'un régime fondé sur la res publica (la « chose publique »).

S'inspirant du stoïcisme, Cicéron estime que la « droite raison », qui permet de rechercher le juste et le bien s'incarne dans la « loi naturelle » (la summa lex) qui régit l'ordre universel de la nature. Elle est présente chez tous les êtres, est antérieure et supérieure à tous les actes humains. La sagesse politique consiste à élaborer des lois humaines qui reproduisent fidèlement les exigences de la loi naturelle. Nous trouvons déjà chez Cicéron la distinction entre « droit naturel » et « droit positif ». Le « droit naturel » renvoie aux valeurs fondatrices de la société, aux normes suprêmes, universelles, permanentes et incontestables, expressions de la nature et de la raison divine. Le « droit positif » désigne les règles humaines, productions juridiques imparfaites, contingentes et changeantes.

Cicéron fait confiance à la rationalité humaine comme un instrument essentiel de gouvernement. C'est en effet la faculté de juger et de raisonner qui produit les lois humaines (Des Lois, I). Associée à la capacité d'éloquence, la connaissance est une vertu essentielle des dirigeants. C'est le gage d'une autonomie de jugement et de décisions justes Cette idée entraîne : 1)- les dirigeants doivent délaisser la mythologie et les superstitions en faisant confiance à leur esprit critique et à leur faculté de réflexion ;

2)- pour diriger la cité, les gouvernants doivent avoir une expérience concrète du pouvoir et maîtriser tous les savoirs relatifs aux lois, aux constitutions, aux ressources publiques, à l'administration, à l'organisation des armés, à l'histoire des sociétés et à la géographie (Des Lois, III).

Cette conception élitiste du pouvoir est tempérée par une vision républicaine. Cicéron ne conçoit pas l'ordre politique à Rome sans la participation du peuple ou l'adhésion des gouvernés, car la « chose publique » (res publica) est la « chose du peuple » (res populi). Le peuple n'est pas une masse inorganique, mais une communauté de citoyens rassemblés « par leur adhésion à une même loi et par une certaine communauté d'intérêts » (De la République,I). C'est dire que le pouvoir n'est juste que s'il est placé au service de la cité. Il perd toute légitimité lorsqu'il devient l'instrument d'une faction, d'un clan. L'importance du droit dans la gestion des affaires publiques signifie deux choses :

1)- Les magistrats (titulaires des charges publiques) n'ont pour fonction que d'appliquer strictement le droit dans l'intérêt de tous les citoyens. Ils doivent être soumis aux lois qu'ils édictent et se montrer dignes en accomplissant les obligations que leur imposent leurs charges publiques.

2)- La république doit promouvoir une répartition « équilibrée » des droits et des devoirs civiques.

Ainsi la conception cicéronienne de la res publica n'opte ni pour un gouvernement des meilleurs (aristocratie) ni pour un pouvoir populaire. Elle repose, comme chez Polybe, sur une constitution mixte, c'est à dire  une juste répartition des pouvoirs établie sur la base des différentes constitutions. Il est bon qu'il y ait dans la république « une autorité supérieure et royale, une part faite aux grands et aussi des affaires laissées au jugement et à la volonté de la multitude », car « s'il n'y a pas équilibre dans la cité des droits, des fonctions et des charges, de telle façon que les magistrats aient assez de pouvoir, le conseil des grands assez d'autorité, le peuple assez de liberté, le régime ne peut avoir de stabilité » (De la République, II).

Cicéron n'exclut pas que la république donne du pouvoir au « prince » (princeps), dès lors que celui-ci respecte les lois et défend la chose publique. Le prince n'est pas un roi, mais le meilleur des citoyens, le « premier entre les pairs » (primus inter pares), un chef chargé de diriger la cité dans le sens de la justice et de la morale. Pour éviter la corruption des gouvernants, le Sénat doit exercer un contrôle sur eux et veiller à la juste proportion des pouvoirs.

Comme on le voit, l'inspiration stoïcienne permet aux penseurs latins de mettre la morale au cœur du pouvoir. Cela implique que l'homme d'Etat respecte le droit et défende un idéal de justice. Toutefois, cette pensée ne réussit pas à freiner la décadence du modèle républicain romain et l'évolution de l'ordre politique vers la concentration du pouvoir entre les mains de l'empereur. A partir du IIIes , l'empire est de plus en plus divisé par des guerres, luttes intestines, des complots au sommet du pouvoir, notamment entre les chefs militaires.

C'est dans ce contexte de décadence politique que se développe le christianisme, malgré les persécutions. En 313, la conversion de l'empereur Constantin fait du christianisme la religion de tout l'empire. A partir de ce moment, cette religion marquera les conceptions du pouvoir durant la période médiévale, en mettant radicalement en cause la pensée rationnelle de l'Antiquité, héritée de la philosophie grecque et des institutions romaines.

Paragraphe2. Polybe

Il est né vers 210 av JC, il meurt aux alentours de 126 av JC. C'est un penseur romain, même s'il est grec d'origine .C'est un citoyen de Mégapolis en Grèce qui a 16 ans est pris en otage par les Romains lorsqu'ils font la conquête de la Grèce Pendant son séjour en Italie il fit une étude approfondie de la politique et de l'état militaire des Romains et s'acquit l'amitié des deux fils de Paul-Émile, surtout de Scipion l'Africain, qu'il accompagna au siège de Carthage (146) il voyagea ensuite en Afrique, en Espagne, en Gaule, et fut chargé par les Romains de diverses missions près des Grecs en faveur desquels il réussit plus d'une fois à adoucir le vainqueur. II mourut en 124, à 82 ans. Il avait écrit La vie de Philopoemen, la Guerre de Numance, une Tactique, et une Histoire générale de son temps, en 40 livres où il menait de front l'histoire de Rome et celle des États contemporains : cette Histoire ne s'étendait que de l'an 220 à 146 av. J.-C.

Polybe  est l'un des premiers grands vulgarisateurs romains de la pensée grecque. Historien réputé, il est convaincu que l'on ne peut expliquer la grandeur d'une civilisation en retraçant simplement les exploits de ses grands personnages. Il fait le choix de décrire minutieusement le fonctionnement de la République romaine. Pour lui, les raisons de la suprématie romaine sont à rechercher dans la supériorité du régime républicain. Polybe présente la République romaine comme un régime original tirant sa puissance du subtil équilibre entre ses institutions.

La République a su réaliser une combinaison vertueuse des différentes constitutions : le pouvoir des deux consuls romains renvoie à la monarchie, celui du sénat à l'aristocratie et la représentation politique accordée au populus romanus à la démocratie. Le meilleur régime est celui qui assure l'équilibre des différents pouvoirs de façon à ce que chacun ait besoin du soutien des autres et qu'aucun ne puisse imposer seul sa volonté. La vertu du modèle républicain romain réside dans l'harmonie entre des pouvoirs dissemblables mais nécessairement solidaires. Polybe réactualise l'idée grecque de la « constitution mixte ».

Ainsi, le régime républicain est gage de stabilité, de puissance et peut maintenir la concorde entre les plus riches et les plus démunis. Cependant, un processus de dégénérescence est présent dans toutes les formes de gouvernement. Polybe rapporte la décadence des constitutions à une succession de cycles historiques : c'est la théorie de l'anacyclosis.

1)- La monarchie peut dégénérer en tyrannie, dès lors que le roi ne gouverne plus en se conformant à la justice, mais profite de son pouvoir pour se livrer à la concupiscence, c'est à dire à satisfaire ses désirs personnels.

2)-La tyrannie est alors renversée par les meilleurs citoyens qui fondent une aristocratie, qui ne peut que se détériorer par la corruption des dirigeants et leur désintérêt pour la justice commune.

3)- La vie politique se dégrade à nouveau et sombre dans l'oligarchie où tous les abus profitent à la minorité gouvernante.

4)- Alors, le peuple se révolte et fonde une démocratie soucieuse d'accorder à chaque citoyen des droits civiques.

5)- Mais le peuple n'est jamais raisonnable et les passions de la foule tendent à l'emporter, engendrant la violence et le désordre. Le régime dégénère en règne de la populace ou ochlocratie

6)- Pour rétablir la concorde, le peuple doit se choisir un monarque dont la vertu est exemplaire. Retour à la case départ. Le cycle de décadence peut se reproduire à nouveau. La pensée de Polybe idéalise tellement le fonctionnement de la République romaine, qu'elle n'analyse pas la complexité des équilibres internes entre les groupes et les institutions. Elle ignore les changements d'équilibre dans la vie politique romaine, marqués tantôt par les périodes de restauration aristocratique, tantôt par l'ouverture à une plus grande démocratie. C'est l'étude scrupuleuse de Cicéron, l'une des plus illustres figures de la pensée politique romaine, qui tentera d'analyser la succession des crises politiques qui secouent Rome.



[1] E.-J. Chevalier, L'âme grecque, cité par Marcel Prélot, Georges Lescuyer, Histoire des idées politiques, 9e éd. op. cit. p. 25.