cours Stratégies de développement
2 LES STRATÉGIES D’INDUSTRIALISATION
2.1 Les fondements des stratégies d’industrialisation
Le choix de l’industrie
La plupart des pays du tiers-monde vont choisir de privilégier l’industrie au détriment de l’agriculture. Un consensus se met en place pour lier de manière forte développement et industrialisation. En effet, beaucoup de pays ont en mémoire les dégâts provoqués par leur spécialisation dans les produits primaires. De plus, le secteur industriel est supposé être facteur d’externalités positives par des effets d’entraînement sur les autres secteurs de l’économie – par l’intermédiaire de gains de productivité, d’un accroissement de la qualifi cation de la main-d’œuvre et en suscitant du progrès technique. De l’autre côté, l’agriculture est considérée comme un secteur archaïque, à faible potentiel de productivité, qui se développera grâce aux effets d’entraînement de l’industrie. On retrouve donc ici l’influence de la thèse dualiste d’Arthur Lewis.
Le raisonnement à maîtriser : l’effet d’entraînement L’effet d’entraînement est un mécanisme par lequel la croissance d’un secteur est censée entraîner l’expansion d’autres secteurs de l’économie du fait du poids ou de l’avancée technologique du secteur leader. Cet effet passe par l’apparition d’externalités positives (innovations technologiques qui vont profi ter aux techniques de production de l’ensemble de l’économie par exemple). Se met alors en place un cercle vertueux de croissance où chaque secteur de l’économie entraîne l’expansion des autres par des effets de liaison. |
Croissance équilibrée ou déséquilibrée
Il faut cependant choisir dans quelles branches de l’industrie investir. Deux thèses s’opposent sur le sujet. Ragnar Nurske et Paul Rosenstein-Rodan considèrent qu’il faut développer une croissance équilibrée, c’est-à-dire répartir les investissements dans toutes les branches industrielles afin d’assurer simultanément une offre et une demande pour éviter tout déséquilibre. Ils s’appuient sur la loi des débouchés de Say, clé de voûte des théories néoclassiques de la croissance. À l’inverse, Albert Hirschman et François Perroux font pour leur part la promotion de la croissance déséquilibrée : il faut concentrer les investissements dans les secteurs moteurs de l’économie (les « pôles de croissance » de François Perroux) afi n de susciter une croissance généralisée par la suite à travers des effets d’entraînement et de liaison. Il ne faut donc pas gaspiller le capital dans des branches qui n’auront pas de retombées positives sur toute l’économie. Ces travaux susciteront les stratégies basées sur le développement de l’industrie lourde. Si les stratégies de développement de cette époque convergent sur le rôle de l’industrie et de l’État, elles divergent sur celui du commerce international comme nous allons le voir maintenant.